Le cadran solaire de la place de la Gare à Arras est le 160e cadran dans le Pas-de-Calais répertorié par la Société astronomique de France. Il a été inauguré le 12 juillet 2019 en présence des porteurs du projet et d’un grand nombre de personnes qui ont trouvé ce projet enthousiasmant. Avec l’aide de l’IMCCE et de Denis Savoie pour le calcul avec des formules modernes et la mise au point, voilà l’un des vieux rêves des Groupes scientifiques d’Arras, les GSA, qui se réalise : doter la ville d’Arras d’un cadran solaire très visible, beau, précis, aux vocations éducatives, culturelles et même touristiques.

« Émerveillez-vous »

Inaug cad solaireComme le veut la tradition, ce cadran est accompagné d’une devise. C’est une version élégante, en latin, de la devise des GSA (Groupes scientifiques d’Arras) qui a été inscrite au sol : "Semper Universi Mirabimur Splendores". Cette inscription est provisoire, dans l’attente des prochains travaux de réaménagement de la place de la gare d’Arras prévus pour les prochaines années.
Ce projet est avant tout un projet pédagogique, et il a permis le développement d'activités à différents niveaux avec de nombreux partenaires. Le déroulé de ces activités sera mis en ligne sous forme de fiches sur le site internet des GSA : reproduction sur moquette ou dans les cours de récréation pour les classes les plus petites, repérage sur la sphère cycle des saisons et calcul des distances avec un peu de mathématiques, voire la trigonométrie et la compréhension de tous les secrets d’un cadran pour les plus aguerris. Sachant que les meilleures idées sont toujours celles à venir, d’autres valorisations pédagogiques pourront voir le jour à moyen terme (si vous avez l’impression que ceci est un appel à idées, l’impression est la bonne ! ).

Ce cadran est dit analemmatique, car le projet se veut participatif : c’est l’observateur qui crée avec son corps l’ombre qui lui permet de lire l’heure. Avec un gnomon suffisamment fin et placé parfaitement verticalement, à une position le long du méridien local tracé au sol qui dépend du jour de l’année, on obtient une heure précise à la minute près : une seconde chance de voir les trains en gare d’Arras être à l’heure, fût-elle solaire! La courbe de l’équation du temps, tenant compte aussi de l’écart en longitude par rapport au méridien de Greenwich, permet de faire la conversion entre le temps solaire local et l’heure UTC. Qu’on ne s’y trompe pas, pour citer Denis Savoie, « un cadran analemmatique est d’un usage faussement simple » : si l’ombre créée par l’observateur facilite la compréhension des directions des points cardinaux et de la variation de la longueur des ombres au cours de la journée, il s’agit d’un véritable défi que de faire comprendre, sans recours à des termes techniques et des équations, pourquoi le cadran est elliptique et pourquoi la position de l’observateur doit changer au cours de l’année. Dans l’Histoire de l’Académie royale des sciences (1757), J.J. Lefrançois de Lalande reconnait d’ailleurs là que « ce problème est un des plus compliqués de toute la Gnomonique. »
Un cadran solaire est un formidable outil pour matérialiser les liens entre la terre et le ciel ; l’adoption d’une heure commune à tout un territoire est aussi nécessaire pour vivre en communauté. Parfaitement calculé avec les formules de l’Observatoire de Paris, ce cadran est, comme tous les autres, un des outils reliés à la Connaissance des Temps et [des] tables astronomiques et calendriers utiles à l’usage des astronomes, des navigateurs et à la vie de la Nation, pour paraphraser l’un des des textes fondateurs du Bureau des longitudes. Mesurer l’heure avec un cadran est aussi une occasion de prendre conscience du temps qui passe et de la nécessité de profiter de chaque jour. Pour les missions d’enseignement de toutes celles et ceux qui aiment parler d'astronomie, et à tous les niveaux, les cadrans solaires sont de formidables outils pour aborder des notions élémentaires (ou pas...) de cosmographie, de mathématiques, et forgent l’esprit critique ; ils sont l’occasion d’association entre science et art, entre science et histoire, et offrent des supports fabuleux aux artistes et artisans les plus talentueux. Rien d’étonnant à ce que les cadrans solaires de toutes sortes, à l’heure d’internet et du temps atomique, continuent de passionner autant sur Terre…. et même au-delà (puisque nombre d’atterriseurs sur la Lune ou d’autres surfaces planétaires en sont pourvus !).

Article extrait de la lettre d'information de l'IMCCE n°160 de septembre 2019